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🎲 Un dé pour prendre une décision ?

Kahneman, le king de la prise de décision.

 

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🧠 Comment les deux systèmes de pensée identifiés par Daniel Kahneman (rapide et lent) influencent vos décisions financières quotidiennes. ⚠️ Les biais cognitifs qui piègent même les plus avertis... 💰 Des conseils pratiques pour appliquer ces principes à votre budget, épargne et investissements. 🛠️ Des outils concrets pour prendre de meilleures décisions : penser en paris, utiliser des nudges, un dé ? 🧘‍♀️ Pourquoi l'important n'est pas de ne jamais se tromper, mais de développer un état d'esprit où chaque décision est prise avec un peu plus de recul. 🎁 Et une nouvelle énigme pour vous faire gagner 100 €.

👩‍🏫 Learn : 4 fois par mois, nous creusons un sujet des finances personnelles pour vous aider à mieux le comprendre.

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⏱️ Temps de lecture : 20 minutes

Hey Snowballers,

J'espère que tout le monde va bien ?

122 - C'est le nombre de décisions conscientes qu'on prend chaque jour en moyenne selon cette étude de Noom réalisée au Royaume-Uni. Tout comme moi, 80 % ont du mal à choisir ce qu'ils vont regarder à la TV ou sur Netflix. Cela me fait penser à ce mème :

Et récemment, j'ai appris que Daniel Kahneman, un de mes économistes préférés qui a dédié une bonne partie de sa vie à étudier la prise de décision, a justement pris une des décisions les plus difficiles : mettre fin à sa vie en Suisse le 27 mars 2024, il y a quasiment un an jour pour jour.

Aujourd'hui, nous allons donc parler prise de décision sous un prisme économique avec quelques outils pour vous aider à prendre les bonnes (ou des décisions tout court si vous êtes bloqués).

🥳 Avant d'aller plus loin, voici la grande gagnante de l'énigme de la semaine dernière : Mélanie C. Vous avez été plus de 100 à répondre, mais seulement 3 personnes ont trouvé la bonne réponse. Vous trouverez la bonne réponse ainsi qu'une nouvelle énigme pour gagner 100 € à la fin de l'intro de notre sujet du jour plus bas.

🎙️ Pour rappel, pour suivre les actus éco, finance et business en moins de 10 minutes tous les matins, vous pouvez vous abonner au Daily Snow sur Spotify ici et sur Apple Podcast là.

Avant de commencer, est-ce que ça vous dit de diversifier votre portefeuille dans des meubles ?

Daniel Kahneman, c'est lui :

C'est un des économistes qui m'a vraiment fait aimer les sciences économiques, notamment parce que ses recherches alliaient sciences économiques et psychologie, et non pas que des chiffres. Il y a quelques jours, je suis tombé sur cet article bouleversant qui expliquait comment cet homme de 90 ans a décidé de mettre fin à ses jours.

This is a goodbye letter I am sending friends to tell them that I am on my way to Switzerland, where my life will end on March 27.

Bouleversant... Jusqu'à la fin de sa vie, la prise de décision aura été au centre de son existence. Philip Tetlock, un psychologue à l'université de Pennsylvanie, nous dit :

À mon avis, il avait l'impression de s'effondrer, tant sur le plan cognitif que physique. Il voulait vraiment profiter de la vie et s'attendait à ce qu'elle devienne de moins en moins agréable. Je soupçonne qu'il ait fait un calcul hédonique du moment où le fardeau de la vie commencerait à l'emporter sur les avantages, et qu'il a probablement prévu un déclin très marqué au début des années 90. Je n'ai jamais vu une mort mieux planifiée que celle que Danny a conçue.

Mais qui était Daniel Kahneman ? C'était un psychologue israélo-américain né à Tel-Aviv en 1934, dont les découvertes ont révolutionné la façon dont nous comprenons la prise de décision. Lauréat du prix Nobel d’économie en 2002 pour avoir intégré la psychologie aux sciences économiques​, il est aussi l’auteur du best-seller Système 1/Système 2 : les deux vitesses de la pensée.

En mars 2024, Daniel Kahneman s’est éteint paisiblement à l’âge de 90 ans​.

Dans une série d'expériences très simples (mais pas simplistes), Kahneman et Tversky ont réfuté l'ancienne définition de la rationalité telle qu'on la connaissait en économie. Cependant, Kahneman n'a jamais prétendu que les gens étaient irrationnels. Il nous disait plutôt qu'ils sont incohérents (surtout les gémeaux 😅), émotifs et facilement trompés, et surtout, trompés par eux-mêmes...

Cette newsletter rend un petit hommage à son impact et vous montre comment appliquer ses idées simplement à vos finances personnelles ou tout simplement pour mieux décider au quotidien.

Mais avant, place à l'énigme du jour.

🕵️‍♀️🕵️‍♂️ Nouvelle énigme pour gagner 100 € (tirage au sort parmi toutes les bonnes réponses) : Prenez l'année où l'homme aux deux systèmes a vu le jour. Divisez par le nombre d'étoiles sur une de ses photos qui ressemble beaucoup à un mème célèbre (indice : 69 avenue Pierre Mendès-France). Multipliez par les décisions conscientes quotidiennes. Ajoutez l'âge final du psychologue moins le rendement maximal d'Enky. Soustrayez le nombre de lettres dans le prénom du cofondateur d'un pionnier des cryptos. Si mon résultat est positif, ajoutez π (pi) arrondi au centième près. Sinon, soustrayez le nombre d’angles dans le logo Snowball. Tout cela vous donnera une combinaison de chiffres. Ensuite, mon premier est l'inverse caché d’un des biais fondamentaux de Kahneman. Mon second est l'initiale du pays où il a choisi son départ. Mon troisième est la note musicale correspondant au mois qu’il a choisi pour nous quitter. Mon quatrième est la première lettre du symbole chimique du métal qui s'envole. 👉 Assemblez les chiffres et les lettres pour obtenir le code qui pourra vous faire gagner 100 €. Envoyez-le-moi en répondant à ce mail. 📆 Date limite de participation : lundi 31/03 à 23 h 59. 💰 Résultat de la semaine dernière : 2580,5 Taux prêt immobilier : 2,91 % → entier inférieur = 2 Temps économisé avec Mon Majord'home : 250 heures Montant minimum chez Swaive : 10 000 € Chiffre règle inflation : 70 (règle des 70) Taux utilisé pour calculer la retraite (règle Trinity) : 4 % Addition des nombres : 2 (taux prêt) + 250 (heures économisées) + 10 000 € (montant Swaive) + 70 (règle inflation) = 10322 Division par la règle Trinity (4 %) : 10322 / 4 = 2580,5. Le piège est donc qu'il ne fallait pas ajouter les 4 % dans l'addition des nombres. Bravo Mélanie, tu recevras bientôt un mail.

Kahneman a popularisé l’idée que notre esprit fonctionne avec deux « vitesses » de pensée.

Le Système 1 correspond à la pensée rapide, intuitive et automatique, celle qui nous fait réagir instantanément sans effort conscient. C’est grâce à ce système 1 que vous pouvez, par exemple, conduire votre voiture en mode pilote automatique en pensant à autre chose.

À l’inverse, le Système 2 correspond à la pensée lente, réfléchie et analytique, que vous utilisez lorsque vous devez résoudre un problème complexe ou prendre une décision importante. Ce mode est plus fiable, mais demande beaucoup d’efforts et peut vite fatiguer​ notre petit cerveau.

💡 Pourquoi c'est important ? Dans vos décisions financières, ces deux systèmes sont constamment à l’œuvre et jouent souvent dans des camps opposés. Le Système 1 peut vous pousser à un achat impulsif en quelques secondes (un gadget sur Insta ou un truc du genre "vite ! Achetez avant que les portes du club ferment !"). Au contraire, le Système 2 est celui qui vous fait comparer soigneusement les prix ou élaborer un budget sur Excel, par exemple. L’astuce n’est pas vraiment de choisir l’un ou l’autre – on a besoin des deux – mais de savoir quel système est aux commandes selon les situations. Pour les petites décisions courantes (choisir une baguette à la boulangerie), le Système 1 suffit largement. En revanche, pour un achat majeur ou un investissement, il vaut mieux ralentir, activer le Système 2 et analyser les options.

Exemple concret : imaginez que vous envisagiez d’acheter une nouvelle télévision pendant les soldes. Votre Système 1, séduit par l’étiquette “-50 %” clignotante, s’emballe et vous fait déjà sortir la carte bleue. Mais votre Système 2 peut intervenir : ai-je vraiment comparé ce modèle avec d’autres ? D'ailleurs, est-ce que j'ai vraiment besoin d’une TV là maintenant ? En faisant une pause et en réfléchissant, vous évitez une décision trop hâtive dictée par l’intuition.

💡 Le conseil de Kahneman ici est simple : plus l’enjeu financier est important, plus il faut donner de l’espace à la réflexion lente. Autrement dit, prenez l’habitude de marquer un temps d’arrêt avant toute décision financière significative, le temps de laisser votre esprit analytique faire son travail.

Mais même en faisant attention aux systèmes fast and slow, nous restons sujets aux fameux biais cognitifs.

Pour rappel, il s'agit de raccourcis de pensée souvent inconscients qui peuvent nous induire en erreur.

Kahneman et son collègue Amos Tversky ont identifié de nombreux biais qui font que nos décisions réelles s’écartent souvent de la pure logique économique. D'ailleurs, c'est comme ça qu'il a un peu révolutionné les sciences éco qui ne prenaient en compte que des décisions rationnelles avant lui.​

Voici trois biais particulièrement courants dans la gestion des finances personnelles, et comment les reconnaître :

L’effet d’ancrage : c’est notre fâcheuse tendance à nous appuyer fortement sur la première information reçue (le point d’ancrage) pour prendre une décision, même si cette information de départ est arbitraire ou non pertinente​. En matière d’argent, l’exemple typique est un prix barré sur un site marchand. Si un ordinateur est affiché à 1200 €, puis soldé à 800 €, le prix initial élevé “ancre” votre perception : vous pensez faire une affaire à 800 €, alors que, comparé à d’autres modèles, ce n’est pas forcément le cas. C'est la même chose pour les abonnements en ligne. Par ex, sur cet outil avec le prix mensuel qui joue le rôle d'ancre pour nous pousser à prendre l'abonnement à vie plus cher :

🚨 À surveiller : lors de vos achats ou négociations (salaire, prix de vente…), méfiez-vous de la première offre chiffrée. Prenez du recul et comparez avec des références multiples pour ne pas vous laisser hypnotiser par un seul chiffre.

La règle du “peak-end” (pic de fin) : ce biais, étudié par Kahneman, nous fait juger une expérience principalement sur son moment le plus intense et sa fin, plutôt que sur la moyenne de tous les moments vécus. C'est pour cette raison, par exemple, que beaucoup de femmes ont un souvenir extrêmement positif de leur accouchement et de leur grossesse, même si c'est un moment difficile dans l'ensemble en général. Autre exemple plus proche de notre thème : si vous avez eu une expérience marquante (bonne ou mauvaise) au cours d’un achat ou d’un investissement, et bien la façon dont cela s’est terminé va colorer toute votre perception de cette décision. Imaginons que vous ayez investi dans une crypto. Si celle-ci augmente de 200 %, puis qu’en fin de parcours vous vendez et vous terminez à -30 %, car vous paniquez, vous avez de grandes chances d'être traumatisés et de garder un souvenir très négatif de cet investissement (malgré de hauts potentiels).

🧑‍🏫 Ce que ça signifie : nos souvenirs financiers peuvent nous tromper (y compris dans notre enfance). Une mauvaise fin peut nous faire oublier les aspects positifs, et inversement, une fin heureuse peut occulter des risques pris en cours de route. Gardez à l’esprit ce biais quand vous évaluez vos expériences passées : essayez de considérer l’ensemble de l’expérience et pas seulement son dénouement.

L’aversion aux pertes : via l'étude de ce biais fondamental, Kahneman a également montré que nous ressentons les pertes environ deux fois plus intensément que les gains équivalents (idem quand vous recevez un feedback négatif by the way)​. En pratique, perdre 100 € vous fait plus mal que gagner 100 € ne vous fait plaisir. Ce biais peut vous conduire à des erreurs, par exemple garder une mauvaise action boursière trop longtemps par refus de “prendre une perte”, ou au contraire refuser un investissement pourtant prometteur par peur de perdre. Faites donc très attention à cette fichue émotion disproportionnée face aux pertes pour éviter qu’elle ne paralyse vos décisions. Se tromper fait partie du jeu, surtout en investissement. L’important est de limiter les pertes, pas de les éliminer totalement.

🧑‍🏫 À retenir - voici ce qu'il faut éviter : Ne prenez pas de décisions financières importantes sur un coup de tête ou sous le coup de l’émotion. Si vous vous sentez très euphorique, stressé·e ou pressé·e, ce n’est probablement pas le meilleur moment pour décider. Accordez-vous quelques heures, voire quelques jours, pour laisser retomber la poussière – votre Système 2 prendra le relais une fois l’adrénaline passée. Et n'oubliez pas la règle des 10/10/10 de la semaine dernière (comment vous sentirez vous 10 minutes après cet achat, 10 jours et 10 ans ?) Évitez de vous fier aveuglément à une seule information (un “avis d’expert” isolé, un prix de référence, une performance passée spectaculaire…). Ces éléments initiaux peuvent être de précieux indices, mais ne les laissez pas dominer toute votre analyse. Cherchez toujours à recouper avec d’autres données ou d’autres avis pour élargir la perspective. Ne tombez pas dans le biais du résultat (“resulting” comme l’appelle Annie Duke) qui consiste à juger qu’une décision était bonne ou mauvaise uniquement en fonction de sa fin. Par exemple, ce n’est pas parce qu’un investissement hasardeux a fini par rapporter gros que c’était une bonne décision – il se peut que vous ayez surtout eu de la chance. À l’inverse, un choix prudent peut se solder par un échec à cause de circonstances imprévues sans que la démarche initiale soit à blâmer. Entraînez-vous à évaluer la qualité de vos décisions sur le processus, pas seulement sur l’issue. Et ça marche aussi pour plein d'autres sujets.

OK, regardons comment appliquer ça à vos finances persos maintenant.

Budgétisation : faire un budget mensuel est l’exemple parfait de mobilisation du Système 2. Pour éviter que ce projet vous décourage (Système 2 paresseux oblige), simplifiez-le. Par exemple, appliquez la règle du 80/20 (la fameuse loi de Pareto) : concentrez-vous d’abord sur les 20 % de catégories qui représentent 80 % de vos dépenses. Inutile de chipoter sur chaque café à 2 € si vos loyers, abonnements, crédits et courses constituent l’essentiel. Identifiez les 2 ou 3 postes principaux de dépenses sur lesquels vous pouvez agir. En traitant ces éléments majeurs, vous obtenez rapidement un impact visible, ce qui motive à poursuivre. Votre Système 1 adorera le côté “quick win” (victoire rapide) et cela encouragera votre Système 2 à continuer le travail plus en détail ensuite. Et sinon, pour les abonnés Snowball+, vous pouvez utiliser notre Google Sheet de gestion de budget gratuitement (sinon 49 € pour les autres).

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Épargne : l’un des meilleurs conseils issus de l’économie comportementale est de mettre son épargne en pilote automatique. Par exemple, programmez un virement automatique chaque mois vers votre compte épargne dès que votre salaire tombe. Vous évitez donc à votre Système 1 la tentation de dépenser cet argent, et vous n’avez même plus à mobiliser votre Système 2 chaque mois pour décider “combien mettre de côté”.

Investissement : Ici, nos biais peuvent coûter cher. D’abord, fixez-vous une stratégie écrite (par exemple : “Je place X € par mois en vue de la retraite, sur un des ETF diversifiés, avec un horizon de 30 ans”). Le fait de formaliser engage votre Système 2. Ensuite, respectez-la même quand votre Système 1 crie panique "je vends tout" ou euphorie "je mets tout mon matelas de sécurité sur du bitcoin".

💡 Astuce : définissez à l’avance des règles (inspirées de votre stratégie) : “Je ne vendrai pas mes actions lors d’une chute passagère de moins de 20 %”, ou “Je n’investis pas dans un produit que je ne comprends pas entièrement”. Ces garde-fous préétablis vous protègent de vous-même.

Enfin, méfiez-vous de l’excès de confiance. Ce biais qui fait que chacun se croit meilleur conducteur que la moyenne, comme le relevaient avec humour les travaux de Kahneman​. En investissement, ne présumez pas que vous battrez toujours le marché. Je suis tombé moi-même de nombreuses fois dans ce piège et ça m'arrive encore aujourd'hui. 🥺 Restez humble, diversifiez vos placements et rappelez-vous que la chance joue un rôle non négligeable sur du court terme, mais votre meilleur ami est le temps et l'horizon long terme.

D'ailleurs, si vous souhaitez mettre en place votre stratégie, j'avais écrit ce guide détaillé il y a quelques années, mais qui fonctionne toujours aujourd'hui : 👩‍🍳 Un tuto pas à pas pour préparer sa stratégie d'investissement.

Achats importants : pour un achat qui engage une grosse somme (voiture, électroménager coûteux, voyage…), utilisez une checklist décisionnelle (je déteste les checklists, mais je sais que vous êtes nombreuses et nombreux à trouver ça utile). Par exemple : 1) Comparer au moins trois offres différentes, 2) Attendre 24 heures avant de valider le paiement (pour laisser retomber l’excitation et réfléchir à froid), 3) Lister les pour et contre de l’achat par écrit. Cocher ces étapes l’une après l’autre structure votre démarche et canalise l’impatience du Système 1. De plus, fixez-vous des limites claires avant de commencer (par exemple : “Je n’achèterai une voiture que si le prix est inférieur à x € et que le coût d’assurance n’excède pas y € par an”). Ainsi, même si vous tombez amoureux d’un modèle en concession, ces critères objectifs vous rappelleront à l’ordre.

Kahneman n’est pas le seul à pouvoir vous guider. Voici quelques outils et auteurs complémentaires qui vous aideront à prendre de meilleures décisions financières (et autres !) :

🃏 “Penser en paris” avec Annie Duke : ancienne championne de poker devenue experte en décision, Annie Duke conseille de considérer chaque décision comme un pari. Et j'aime bien cette idée. En effet, personne n’a la certitude du résultat, mais en évaluant les probas et les risques comme un joueur de poker, on peut améliorer ses choix. En pratique, adoptez son réflexe : « Si je devais miser de l’argent sur cette décision, qu’est-ce que cela changerait à mon analyse ? ». Par exemple, avant de changer de travail ou d’acheter un bien immobilier, imaginez que vous pariez sur la réussite de ce choix – quels facteurs vous feraient hésiter à miser ? C’est une manière originale et concrète de faire émerger les zones d’incertitude que votre Système 1 aurait tendance à ignorer.

🫸 Les nudges de Richard Thaler : mentionné plus haut pour l’épargne automatique, Richard Thaler (prix Nobel 2017) est connu pour ses nudges, ces incitations douces qui orientent nos décisions sans nous forcer la main. Dans vos finances, pensez aux petits réglages qui peuvent compenser vos biais : par exemple, organisez vos comptes bancaires en allouant à l’avance x € pour les loisirs, x € pour les factures, etc., afin de vous autodiscipliner. Utilisez aussi les apps : applications de budget avec alertes et plafonds de dépenses, arrondis automatiques de paiements vers l’épargne, etc. La philosophie de Thaler est simple : rendez le choix vertueux plus facile que le choix irrationnel. Par exemple, désactivez le “1-Click” sur les sites marchands (pour réintroduire un peu de friction et inciter à réfléchir).

📊 La règle du 80/20 (principe de Pareto) : ce principe simple peut vous aider à relativiser et hiérarchiser vos efforts. Il se traduit souvent ainsi : 80 % des résultats proviennent de 20 % des efforts. Identifiez les quelques décisions ou dépenses clés qui ont le plus d’impact sur votre situation. Par exemple, négocier une baisse de 0,5 % sur votre prêt immobilier peut avoir bien plus d’effet sur vos finances que de traquer tous les coupons de réduction à l’épicerie (idem pour changer l'assurance de votre prêt immo). Cela ne veut pas dire qu’il faut négliger les petites économies, mais qu’il faut d’abord concentrer votre énergie là où elle paie vraiment.

💥 Le pré-mortem (ou le scénario catastrophe comme j'aime l'appeler) : cet outil, recommandé aussi par Kahneman himself, consiste à imaginer qu’une décision que vous prenez vient d’échouer lamentablement, puis à réfléchir aux causes de cet échec. Un peu lugubre, mais extrêmement efficace pour découvrir des risques qu’on préfère souvent ignorer. Par exemple, vous hésitez à lancer votre newsletter ? Faites un pré-mortem : visualisez qu’un an plus tard, le projet tombe à l'eau. Était-ce à cause d’un manque de temps ? D’un concurrent agressif ? D’un désintérêt du public ? En identifiant ainsi les scénarios catastrophes, vous pourrez soit renoncer, soit mettre en place des mesures préventives (ex : se former en marketing, dégager du temps dès le début, etc.). Mieux vaut imaginer les problèmes avant qu’ils n’arrivent, quand on peut encore ajuster le tir.

🗂️ La matrice d’Eisenhower : cette matrice vous aide à classer vos tâches (ou décisions à prendre) selon deux axes : urgent/non urgent et important/non important. Elle se présente sous forme de quatre cadrans :

  • Urgent et important : à FAIRE tout de suite (ce sont les priorités absolues, par exemple, payer une facture imminente pour éviter des pénalités) ;
  • Important, mais non urgent : à PLANIFIER à l’agenda (exemple : constituer votre épargne de retraite – crucial, mais qui peut être découpé en étapes sur la durée) ;
  • Urgent, mais non important : à DÉLÉGUER si possible (exemple : la paperasse administrative courante. Si quelqu’un d’autre peut s’en charger ou si vous pouvez automatiser, faites-le pour vous concentrer sur plus important) ;
  • Ni urgent ni important : à ÉLIMINER tout simplement (ces tâches “parasites” qui prennent du temps sans rien apporter. Dans votre budget, ça peut être des abonnements inutilisés dont il vaut mieux se débarrasser par ex.).

Et concrètement ? Dressez donc la liste des choses que vous avez à faire autour de vos finances (payer des factures, préparer la p****n de déclaration d’impôts, comparer les offres d’assurance vie, suivre vos dépenses, étudier un investissement immo, etc.). Classez-les honnêtement dans la matrice. Vous verrez plus clair dans vos priorités. Par exemple : régler un découvert bancaire important ou un crédit à la conso avec un énorme taux est urgent et important (action immédiate), alors que réfléchir à une éventuelle renégociation de prêt est important, mais pas forcément urgent (à programmer sur votre calendrier).

En revanche, passer une heure à scruter des micro-variations de vos actions en bourse chaque matin n’est ni vraiment urgent ni important pour un investisseur long terme, c’est plutôt anxiogène qu’utile, donc à la poubelle.

L’intérêt de la matrice est donc tout simple : elle vous fait gagner en sérénité en vous montrant où mettre votre énergie en premier, et vous déculpabilise de reporter ou d’abandonner ce qui n’en vaut pas la peine.

🎲 La méthode YOLO que je ne recommande pas : comme Luke Rhinehart, un personnage de livre qui est psychiatre new-yorkais, utilisez un dé pour prendre vos décisions.

Voilà ! C'est tout pour aujourd'hui. Comme nous l'a fait remarquer Kahneman tout au long de sa vie, bien décider ne veut pas dire être parfait.

L’important à retenir, c’est que tout le monde (et même les experts en psychologie ou les investisseuses et investisseurs chevronnés) reste vulnérable aux biais et aux erreurs de jugement. Ne visez donc pas la perfection, elle n'existe pas.

Prendre de bonnes décisions, surtout financières, c’est avant tout se lancer déjà, puis être attentif et méthodique (même si c'est tout simple au début).

Chaque petite amélioration compte. Décider de mettre 50 € de côté ce mois-ci, de comparer deux devis au lieu d’un seul, ou de ne pas cliquer tout de suite sur “buy now, pay later” la prochaine fois que vous voyez une promo alléchante, ce sont des baby steps comme on dit, qui, cumulées, feront une grande différence sur le long terme (la magie des intérêts composés #EffetBouleDeNeige).

Et souvenez-vous que l’important n’est pas de ne jamais se tromper, mais de développer un état d’esprit où chaque décision est prise avec un peu de recul.

À très bientôt !

Yoann ❤️